5. La discorde

Le soleil se leva sur l’île. L’équipage ronflait à faire trembler la terre mais, cette fois-ci, Amos avait pris soin d’emporter des bouchons de cire. Il s’était rappelé son premier voyage avec les béorites ! Le garçon savait, depuis sa précédente aventure, qu’il valait mieux s’équiper pour réussir à fermer l’œil dans un camp d’hommes-ours fatigués.

Le jeune porteur de masques avait très bien dormi. Il s’était senti bien au chaud, confortablement emmitouflé dans ses couvertures. Mais, soudain, il eut l’étrange impression d’être prisonnier d’un gros cocon de soie. Il avait chaud… peut-être un peu trop maintenant ! Amos essaya de bouger, sans succès. Curieux, il ouvrit légèrement les yeux et…

— DES ARAIGNÉES ! Il y a des araignées partout ! hurla Kasso, complètement paniqué.

Le porteur de masques se réveilla d’un coup, comme sous l’effet d’une douche froide ! Il était incapable de faire un mouvement. Dans la pénombre de la tente, il vit se mouvoir des milliers d’araignées. Il y en avait partout ! Des grandes et des petites, des minces et des longues ! Leurs pattes s’affairaient à transformer la grande tente en un immense cocon. Amos remarqua que tous les dormeurs avaient été ficelés, soigneusement emballés afin qu’ils ne puissent plus remuer un orteil.

Kasso criait pour essayer de réveiller l’équipage. Bientôt, une clameur générale s’éleva dans la tente. Les béorites, prisonniers de la toile d’araignée, criaient leur dégoût sans être en mesure de fuir.

Banry, rouge de colère de s’être fait si naïvement piéger, attaquait les arachnides en tentant de les mordre. Hulot pleurait en appelant sa mère, et Helmic se débattait comme un démon en espérant se libérer. Rien à faire, ils étaient tous ficelés comme des saucissons. Béorf beugla :

— Fais quelque chose, Amos ! Brûle ces maudites bêtes !

Le jeune porteur de masques réfléchit rapidement. Le feu allait certes faire brûler les araignées, mais aussi la tente et tous ses occupants ! Amos avait besoin de ses bras pour faire lever le vent, et l’eau, dans le cas présent, ne pouvait pas lui être d’un grand secours.

— Je ne peux rien faire, Béorf ! Je ne peux vraiment rien faire… Il faudrait que quelqu’un me libère les bras…

La tente s’ouvrit à ce moment et la magnifique Otarelle se précipita sur Amos. Des replis de sa jupe, elle sortit un grand couteau rouillé et libéra habilement le garçon. La jeune sirène le prit par la main et l’amena à l’extérieur de la tente.

— Merci, Otarelle ! s’exclama Amos.

— Allez, Amos, tu me remercieras plus tard ! s’écria la belle héroïne. Fais quelque chose !

— Tout de suite…, répondit le porteur de masques en prenant une étrange position orientale.

— Nous allons bien voir l’étendue de tes pouvoirs, jeune prétentieux…, marmonna la sirène pour elle-même.

Les jambes écartées et les mains jointes devant la figure - comme pour faire une prière -, Amos se concentra en respirant profondément. Il écarta d’un coup les bras et poussa un grand cri. Une fabuleuse bourrasque s’engouffra dans la tente et la propulsa à plusieurs mètres dans les airs. Les araignées furent en même temps projetées tout autour, sur les rochers et les arbres. Les plus petites volèrent même jusque dans l’océan, de l’autre côté de l’île.

Pour prévenir un éventuel retour des arachnides, Amos frappa trois fois le sol avec ses pieds et courut en décrivant un cercle autour des béorites toujours ficelés. Une grande trace de feu, suivant chacun de ses pas, s’éleva en formant une muraille brûlante, infranchissable par les araignées.

À l’aide du couteau d’Otarelle, Amos délivra Banry. En quelques minutes, tous les béorites furent libérés de leur cocon et prêts à partir rapidement de cette île maudite. Amos fit tomber la barrière de feu… Les araignées étaient parties !

— Bravo, Amos ! dit Béorf à son ami. Encore une fois, nous te devons une fière chandelle ! Il y avait longtemps que je ne t’avais pas vu faire de la magie… Tu as vraiment un meilleur contrôle !

— Disons que les leçons de Sartigan y sont pour quelque chose ! répondit fièrement Amos. Mais je crois que la personne qu’il faut remercier, c’est plutôt Otarelle. C’est grâce à son courage que nous sommes encore vivants. Ces araignées nous auraient sucé le sang jusqu’à la dernière goutte si elle n’avait pas été là !

— Oui, c’est bien vrai, approuva Béorf. Merci, Otarelle !

— De rien, répliqua la sirène. Je dormais dans l’eau quand, soudain, j’ai eu une sorte de pressentiment. Je suis sortie de l’océan et j’ai entendu des cris provenant de la tente. Prenant mon courage à deux mains, je suis entrée pour sauver Amos. Je savais qu’il pourrait faire quelque chose pour vous secourir. Il est si… habile !

— C’est bizarre, fit Béorf en regardant de près la sirène, tu dormais dans l’eau, mais tu n’as pas les cheveux mouillés ? Je suppose qu’ils sèchent très vite ? Je me trompe ?

— Mais… intervint Amos, qu’est-ce que tu essaies de faire, Béorf ? Elle nous a sauvés. Pourquoi mentirait-elle ?

— Non, ça va, Amos, soupira mélancoliquement Otarelle. Ton ami ne me connaît pas comme toi et il est normal qu’il ne me fasse pas confiance. Mes cheveux ont séché très vite à cause de la chaleur dégagée par le cercle de feu d’Amos tout à l’heure. Tu es satisfait ?

— Presque ! lança âprement le gros garçon. Cela n’explique pas pourquoi tu possèdes un couteau en fer, susceptible de rouiller dans l’eau de l’océan et de rapidement se dégrader ! Ce n’est pas toi, Amos, qui me disais que toutes les armes des sirènes étaient faites de coraux et de coquillages ?

— ÇA SUFFIT, BÉORF ! cria Amos. Je ne comprends pas ton acharnement contre Otarelle. Peut-être es-tu jaloux parce qu’elle s’intéresse davantage à moi qu’à toi ? Les filles ne sont pas toutes des Médousa prêtes à nous trahir à chaque instant !

— Je n’ai jamais dit cela ! répondit Béorf en grognant. Et je t’interdis de dire du mal de Médousa. C’était une charmante gorgone, beaucoup plus que cette menteuse d’Otarelle !

— Excuse-toi, Béorf, pour ce que tu viens de dire ! lança Amos. Excuse-toi sinon…

— SINON QUOI ? s’écria Béorf en remontant ses manches. Tu seras par terre avant même de pouvoir utiliser un de tes sorts…

— Tu es beaucoup trop lent et trop prévisible pour constituer une menace ! répondit Amos en ricanant méchamment.

Comme ils allaient en venir aux coups, Rutha la Valkyrie les interrompit brusquement :

— Au lieu de vous battre, venez nous aider à charger le drakkar ! Vous réglerez vos comptes après… Nous pouvons même vous laisser sur l’île si vous voulez ! Vous pourrez vous entre-tuer en paix ! Pour l’instant, il nous faut de l’aide ! Tout de suite !

Béorf fit quelques pas en arrière, grogna en montrant à Amos ses canines acérées, puis se dirigea vers le navire. Le porteur de masques lui emboîta le pas, accompagné d’Otarelle.

— Je suis désolée, murmura la sirène à Amos. Ce qui arrive est de ma faute ! Je vais partir et vous laisser, toi et ton ami…

— Non, Otarelle, répondit Amos. Ce n’est pas de ta faute, c’est de la sienne ! Béorf a la tête dure et il s’imagine des choses fausses à ton sujet. Je crois qu’il est jaloux… Tu vois, nous sommes comme deux frères, toujours ensemble, toujours partants pour l’aventure, et là… disons que je m’occupe moins de lui… eh bien… je crois qu’il le prend mal.

— L’important, c’est que, TOI, tu me fasses confiance, susurra Otarelle en le prenant par la main.

*   *

*

Le drakkar reprit la mer, et les béorites, perturbés par leur manque de sommeil, se remirent à la rame en maugréant. Amos se plaça aux côtés de Béorf à l’avant du navire, et les garçons se mirent à la tâche dans un silence glacial. Ils ne se parlaient pas et s’ignoraient, indifférents l’un à l’autre.

Les béorites avaient confortablement installé Otarelle au centre du drakkar, près du mât. Bien assise sur d’épaisses fourrures, ses longs cheveux noirs flottant au vent, la jeune sirène avait l’air d’une touriste en vacances. Amos ne pouvait s’empêcher de la regarder souvent du coin de l’œil. Elle était si belle ! Béorf la regardait aussi, mais en se demandant qui elle était réellement et pourquoi elle mentait aussi effrontément.

Plusieurs heures passèrent sans que les rameurs ne s’arrêtent. Banry ordonna soudainement une pause bien méritée ! Le vent soufflait assez fortement pour propulser à lui seul le lourd drakkar.

Assoiffés, les béorites ouvrirent un des barils d’eau potable. Ils y découvrirent plusieurs araignées flottant à la surface. L’eau avait maintenant une couleur brune.

— Sales bêtes ! hurla Helmic. Elles se sont noyées en empoisonnant notre eau ! Tout ça est maintenant imbuvable !

— Vérifiez tout, ordonna Banry, Qu’on regarde le vin et la nourriture ! Et soyez vigilants, notre survie en dépend !

Au grand désespoir de tous, il n’y avait plus rien de comestible. Les barils de bière et de vin avaient été, eux aussi, contaminés. La viande était couverte de taches blanches, et tous les pots hermétiquement scellés avaient été ouverts. Rien ! Il n’y avait plus rien de bon. Banry ordonna qu’on jette tout par-dessus bord.

Les membres de l’équipage s’exécutèrent, l’air profondément contrarié.

— Quelle tuile ! soupira Rutha. Le voyage est sérieusement compromis. Comment allons-nous réussir à survivre en mer sans nourriture, et surtout sans eau potable ? Nous sommes de bons pêcheurs et pouvons toujours nous efforcer de modérer notre gigantesque appétit. Mais le problème demeure entier : où trouver de l’eau ?

Après avoir consulté ses cartes, Kasso déclara qu’il y avait une série d’îles, à huit jours de navigation, vers l’ouest. Y avait-il de l’eau potable sur ces terres ? Il ne le savait pas.

Les béorites regardèrent alors le capitaine en attendant ses ordres. Celui-ci leur expliqua alors qu’ils avaient trois possibilités. La première : rebrousser chemin et rentrer à Upsgran. Avec un peu de chance, les béorites arriveraient déshydratés, mais vivants. La deuxième : retourner à l’île des araignées et chercher de l’eau. La troisième et dernière solution : essayer d’arriver à l’archipel indiqué sur les cartes marines de Kasso, au risque de pas y trouver d’eau.

— Vous savez, ajouta Banry, que, selon nos lois, nous devons voter pour prendre une décision.

— Moi, déclara Helmic l’Insatiable, si vous décidez de retourner à Upsgran, je me jette à l’eau ! J’aime mieux mourir dans l’action que de rentrer à la maison la tête basse comme un chien battu. Je gagne ou je perds, mais je n’arrête pas en plein milieu d’une aventure.

— Eh bien, lance-toi à l’eau ! s’écria Hulot. Il vaut mieux rentrer vivants à Upsgran, refaire des provisions et recommencer l’aventure. Il serait tout à fait stupide de risquer notre vie pour un principe aussi absurde que le tien. Nous arriverons à l’île de Freyja avec quelques semaines de retard, c’est tout ! Rien ne presse…

— Moi, j’ai confiance ! assura Kasso. Le vent est bon et constant ! Tentons notre chance vers l’ouest.

— Je vous rappelle, ajouta Banry, que nous devons être tous d’accord avant de bouger d’un côté ou d’un autre. Baisse la voile, Goy, nous demeurerons ici jusqu’à ce qu’il y ait consensus !

— Moi, je veux retourner au village, dit Piotr le Géant. J’ai faim…

— Allons ! intervint Rutha la Valkyrie. Nous perdons du temps ! Prends la décision, Banry, et au diable les avis de chacun !

— Nous avons une loi et nous devons la respecter, dit Alré la Hache en pesant bien ses mots. Banry est capitaine du drakkar et aussi chef du village ; il se doit d’appliquer le code de façon stricte ou sinon l’anarchie nous guette !

— Moi, lança Goy en se curant les oreilles, je dis comme mon frère Kasso. La famille Azulson est unanime, nous devons poursuivre notre route !

— Et vous ? demanda Banry aux garçons. Qu’en pensez-vous ?

— Je crois que nous devons continuer notre route et risquer le tout pour le tout, affirma Amos, confiant.

— Et moi…, dit Béorf sur un ton angoissé, j’ai bu de l’eau un peu après notre départ et je pense que je vais être malade…

Le gros garçon se pencha par-dessus le bastingage du drakkar et vomit bruyamment. Les béorites se précipitèrent vers lui et l’installèrent à la place d’Otarelle. Celle-ci se retrouva assise à la place du gros garçon, tout près d’Amos.

— Ton ami semble en mauvais état ! lança la belle sirène. J’espère que ce ne sera pas trop grave !

— J’espère aussi…, répondit Amos en baissant la tête. Voilà que j’ai des remords pour ce qui est arrivé ce matin. C’est la première fois que nous nous disputons ! Nous sommes toujours d’accord d’habitude… Je ne comprends pas ce qui se passe.

— C’est normal, assura la sirène sur un ton réconfortant. Je ne connais personne qui ne se dispute pas un jour ou l’autre avec un ami. Il y a toujours des malentendus dans la vie… Ton ami tient beaucoup à toi ! Il a peur de te perdre. Ce n’est pas parce que nous nous entendons bien, toi et moi, qu’il est moins ton ami. Tout ce que je veux, c’est qu’il me donne une petite chance !

— Oui, tu as raison ! Reste ici, Otarelle, dit Amos en se levant, je vais aller voir si je peux faire quelque chose pour lui.

Otarelle sourit en signe de consentement. Puis, seule à la proue du drakkar, elle caressa son pendentif et murmura pour elle-même :

— Va, petit crapoussin ! Va essayer d’aider ton ami qui se meurt ! Ah, pauvre Béorf… Finir sa vie ainsi, seul en mer, abandonné de tous… c’est terrible ! N’est-ce pas, Gunther ? Ce gros et fort garçon ne sait pas ce qui l’attend. Ce poison est très fort et il n’y a pas d’antidote. C’est déjà trop tard pour lui ! Il ne sait pas que, lentement, son sang deviendra noir et que des centaines de pustules virulentes apparaîtront partout sur son corps. Il souffrira comme jamais il n’a souffert ! Sa peau s’asséchera et tombera en lambeaux, ses os se briseront lentement, un à un, mais son cœur, ses poumons et son cerveau demeureront en excellent état. Tu sais ce que cela veut dire, Gunther ? N’est-ce pas que tu le sais ? Il demeurera conscient lors de son agonie, comme ta fille, Gunther ! Il connaîtra le même sort que ta charmante petite fille. Évidemment, je ne pourrai pas utiliser son corps pour faire de l’huile d’enfant, ingrédient indispensable pour le vol des sorcières, mais je me reprendrai avec le jeune Amos. Mais non, Gunther, ne t’en fais pas ! Avant qu’il meure, Béorf me dira où il a caché cet œuf de dragon… Non, je ne l’ai pas vu le charger dans le navire ce matin. Comme toutes les provisions ont été jetées à la mer, il est certainement tout près. Mais où ? J’ai pourtant regardé partout, je ne le vois pas. Ce ne sera pas long, Gunther ! Patience… patience…

 

La Malédiction de Freyja
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